InternationalAFP




Le petit royaume de l’ex-Swaziland vote, mais le roi conserve son pouvoir absolu

Un demi-million d'électeurs du petit royaume africain d'eSwatini, une des dernières monarchies absolues de la planète, sont appelés à élire…

Un demi-million d’électeurs du petit royaume africain d’eSwatini, une des dernières monarchies absolues de la planète, sont appelés à élire vendredi leurs députés lors d’un scrutin qualifié de « farce » par l’opposition, en l’absence de partis politiques.

Les candidats aux 59 postes soumis au vote se présentent à titre personnel et non sous l’étiquette d’un parti.

Les formations politiques, interdites dans ce pays d’Afrique australe jusqu’en 2005, ne sont toujours pas autorisées à participer aux élections.

« Des élections sont une compétition entre partis politiques. Mais ici, on assiste à une non-élection, un système de nomination par les royalistes. Si vous y participez, vous ne pouvez pas défendre vos idées politiques », explique à l’AFP Alvit Dlamini, à la tête du Ngwane National Liberatory Congress (NNLG), le plus ancien parti de l’eSwatini ou ex-Swaziland.

La commission électorale, elle, défend bec et ongles ce système.

« Les élections dans l’eSwatini sont uniques », reconnaît sa vice-présidente Pholile Dlamini, qui parle de « démocratie monarchique ».

« Vous êtes choisis par votre communauté en raison de votre mérite individuel et non de votre affiliation », ajoute-t-elle.

« Il n’existe pas un seul type de démocratie ou de gouvernement. Chaque pays a l’obligation de mettre en place un système qui correspond à ses normes culturelles et ses traditions », se défend Mme Dlamini. « Le pouvoir est entre les mains du peuple ».

Dans la réalité pourtant, le Parlement et le gouvernement sont aux ordres du roi Mswati III, au pouvoir depuis 1986.

La chambre basse composée de 69 membres – 59 élus et 10 nommés par le roi – ne peut pas adopter de loi qui n’aurait pas reçu le blanc-seing du monarque.

Ce dernier exerce également un pouvoir absolu sur la chambre haute, qui compte 20 membres nommés par ses soins et 10 élus par la chambre basse.

Il contrôle enfin l’exécutif et le judiciaire: il nomme le Premier ministre, son gouvernement et les juges qu’il peut démettre.

– Roi extravagant –

« Le système politique est censé être inclusif mais, de fait, il concentre les pouvoirs » entre les mains du roi, constate Bheki Makhubu, rédacteur en chef du mensuel The Nation.

« Le roi a toute autorité, basée sur la présomption qu’il est le plus sage d’entre nous », ajoute-t-il, expliquant que « le gouvernement ne tolère aucune dissidence ».

Le journaliste est bien placé pour en parler. Il a passé quinze mois derrière les barreaux en 2014-2015 pour avoir publié des articles critiquant le gouvernement et le système judiciaire du pays.

Dans ce contexte, la campagne électorale a été discrète, comme l’a concédé Pholile Dlamini. Les affiches des candidats sont rares, les meetings ne font pas recette.

Preuve du règne sans partage du roi Mswati III, il a rebaptisé unilatéralement cette année son pays eSwatini (« terre des Swazis », en langue swati).

Le « Lion de la nation » dispose d’une fortune personnelle estimée à environ 50 millions de dollars, alors que les deux-tiers de la population de ce petit royaume vallonné enclavé entre l’Afrique du Sud et le Mozambique vivent sous le seuil de pauvreté.

Amoureux des voitures de luxe et des fêtes décadentes, Mswati III s’est marié à quinze reprises, souvent avec de très jeunes filles. Certaines ont été choisies pendant la « Fête des roseaux », où des vierges dansent, seins nus, en l’honneur du souverain. Une autre est une ancienne lauréate du concours « Miss Swaziland Ado ».

Avec 25 enfants, il reste très loin derrière son père, marié plus de 70 fois et père de plus de 200 enfants.

Vendredi, les bureaux de vote sont ouverts de 07H00 (05H00 GMT) à 17H00 (15H00 GMT) et les premiers résultats sont attendus samedi.

L’Union africaine (UA) et le groupe régional de la SADC (Communauté pour le développement de l’Afrique australe) ont envoyé des observateurs.

En revanche, l’Union européenne (UE), qui avait souligné dans son rapport électoral en 2013 que « les principaux principes d’un Etat démocratique n’étaient pas en place » dans l’ex-Swaziland, n’a pas fait le déplacement.

Suivez l'information en direct sur notre chaîne