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Législatives au Cambodge: le parti d’Hun Sen revendique « l’ensemble des sièges »

Le parti au pouvoir du Premier ministre Hun Sen a annoncé avoir "remporté l'ensemble des sièges" au Parlement au lendemain…

Le parti au pouvoir du Premier ministre Hun Sen a annoncé avoir « remporté l’ensemble des sièges » au Parlement au lendemain d’élections législatives entièrement contrôlées par le régime, en l’absence de la principale force d’opposition.

Le Parti du peuple cambodgien (PPC) « a remporté tous les sièges à travers le pays » (125), a déclaré lundi son porte-parole, Sok Eysan. Les résultats définitifs doivent être officialisés le 15 août.

« Le soutien écrasant du peuple cambodgien a donné à Hun Sen une nouvelle chance de poursuivre sa mission historique », a-t-il ajouté alors que l’homme fort du Cambodge est au pouvoir depuis plus de 33 ans.

Dans les rues de la capitale, peu de gens acceptaient de s’exprimer. « Je prédis que la vie sera difficile pour les cinq années à venir », a relevé un vendeur de nourriture sous couvert d’anonymat. « Encore lui! C’est désespérant », a soupiré un homme assis à la terrasse d’un café.

En 2013, le principal mouvement d’opposition, le Parti du sauvetage national du Cambodge (CNRP), avait remporté plus de 44% des voix aux législatives.

Cherchant à éviter qu’un tel scénario se reproduise, le régime a opéré un tour de vis autoritaire: le CNRP a été dissous par la Cour suprême fin 2017 et son chef, Kem Sokha, emprisonné.

La question-clé est maintenant « de savoir ce que la communauté internationale va faire », a déclaré à l’AFP Phil Robertson, directeur adjoint de Human Rights Watch pour l’Asie.

Les observateurs se demandent si des sanctions commerciales et financières vont être prononcées à l’encontre du régime qui a bénéficié d’immenses programmes d’aides au développement pour soutenir sa marche vers l’économie de marché.

Jusqu’ici, Bruxelles et Washington ont refusé d’apporter leur soutien à l’organisation du scrutin et quelques restrictions très limitées ont été édictées.

Mais aujourd’hui, pour Sam Rainsy, fondateur du CNRP, la donne a changé. « Pour la première fois depuis les élections organisées par l’ONU en 1993, le Cambodge n’a plus de gouvernement légitime reconnu comme tel par la communauté internationale », a souligné l’opposant depuis la France où il s’est exilé pour échapper à la prison.

– « Intimidation » et « manipulation » –

Sam Rainsy avait appelé au boycott du scrutin, dénoncé comme une « farce ». Selon la Commission électorale cambodgienne, contrôlée par le régime, le taux de participation avoisine 82%, un chiffre largement supérieur à celui des dernières législatives de 2013 (69%).

« De très nombreux observateurs ont constaté que la campagne électorale a été assombrie par l’intimidation des électeurs et la manipulation des urnes », a déploré lundi le ministère des Affaires étrangères canadien.

Il a exhorté le gouvernement de Hun Sen « à reconnaître les droits civils fondamentaux du peuple cambodgien, à rétablir les libertés d’expression » et « à libérer Kem Sokha », accusé d’avoir voulu renverser le gouvernement avec la complicité des Etats-Unis.

Quelque 8,3 millions d’électeurs étaient inscrits sur les listes électorales et 80.000 policiers ont été mobilisés dimanche, la police se disant prête à « empêcher tout acte de terrorisme et de chaos ».

Hun Sen a averti qu’il ne tolèrerait aucune contestation des résultats, lors de son dernier grand meeting de campagne, que « des mesures légales pour éliminer les traîtres » avaient été prises, une allusion au CNRP accusé de comploter contre le gouvernement avec le soutien des Etats-Unis.

Le gouvernement a depuis brandi la menace d’une ère de chaos dans le pays encore traumatisé par le régime khmer rouge, coupable d’un génocide qui a fait près de deux millions de morts dans les années 1970.

Devenu Premier ministre en 1985, à seulement 32 ans, Hun Sen, ex-Khmer rouge qui a toujours minimisé son rôle au sein du mouvement ultra-maoïste, a tissé une toile au maillage serré pour assurer sa longévité politique. Il a placé ses trois fils, qui occupent des postes-clés au sein de l’armée et du parti au pouvoir, au coeur de ce dispositif, et ces derniers ont participé activement à la campagne. Le PPC a remporté toutes les élections depuis 1998.

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