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Les Brésiliens élisent leur président, l’extrême droite grande favorite

Un Brésil en crise et très divisé a commencé à voter dimanche pour la présidentielle, avec le candidat d'extrême droite…

Un Brésil en crise et très divisé a commencé à voter dimanche pour la présidentielle, avec le candidat d’extrême droite Jair Bolsonaro, un nostalgique de la dictature militaire, grand favori de ce premier tour.

Sous la surveillance de quelque 280.000 policiers et militaires, les premiers bureaux de vote ont ouvert à 08H00 locales (11H00 GMT) pour les 147 millions d’électeurs.

Une demi-heure plus tard, des files d’attente de dizaines d’électeurs s’étaient formées dans le centre de Sao Paulo ou de Rio, à Copacabana, selon des journalistes de l’AFP. Les derniers bureaux fermeront à 19H00 (22H00 GMT) et les résultats définitifs sont attendus dans les deux heures.

Bolsonaro, ex-capitaine de l’armée très clivant, devenu un phénomène électoral depuis qu’il a frôlé la mort dans un attentat le 6 septembre, a redit samedi qu’il pouvait « plier l’affaire dès le premier tour ».

Un scénario qui fait trembler les démocrates dans le grand pays latino-américain, mais que certains analystes n’excluent plus.

« Le Brésil veut du changement », a déclaré à l’AFP Roseli Milhomem, l’une des prmeières à aller voter, dans un bureau du centre de Brasila. « Les dés sont jetés, il ne faut pas se voiler la face ».

Le député de 63 ans, qui s’est fait connaître par ses saillies racistes, misogynes et homophobes, devrait au moins facilement se qualifier pour le 2e tour.

« Ca serait une catastrophe s’il passait », déclare à l’AFP José Dias, qui attend de voter dans une école du nord de Brasilia. « Beaucoup de jeunes votent pour lui, ils ne savent pas ce qu’a été la dictature » (1964-85). « Moi je vais voter (Fernando) Haddad », dit cet électeur de gauche.

Les instituts Ibope et Datafolha accordaient samedi soir à Bolsonaro, candidat du Parti social libéral (PSL), 40 et 41% des intentions de vote.

En 2e position, avec 25%, arrive Fernando Haddad, 55 ans, qui a remplacé pour le Parti des Travailleurs (PT, gauche) l’ex-président Lula — emprisonné pour corruption et inéligible.

Le duel qui se profile pour le 2e tour du 28 octobre sera le résultat d’une attraction des électeurs vers les extrêmes, concomitante à l’effondrement inattendu du centre, notamment le grand parti PSDB de Geraldo Alckmin.

Grièvement blessé lors d’un attentat, Jair Bolsonaro a mené la danse depuis son lit d’hôpital dans une campagne qui s’est radicalisée à l’approche du scrutin, avec des discours souvent haineux. Sa force de frappe a été décuplée par les réseaux sociaux.

Il a prospéré sur « deux courants forts », note le politologue David Fleischer: un fort sentiment anti-PT et anti-Lula, et un rejet de la classe politique classique.

« Il est perçu comme étant antisystème et un outsider alors qu’il est député depuis cinq mandats », relève M. Fleischer.

– « Le meilleur pour le pays » –

Ce catholique admirateur de Donald Trump est vu comme l’homme fort qui peut endiguer la violence avec une approche musclée (port d’armes, exécutions extra-judiciaires) et redresser l’économie avec un « Chicago boy »: l’ultra-libéral Paulo Guedes.

Il n’a jamais été impliqué dans un scandale de corruption et veut nettoyer le pays de « ses élites corrompues ».

Ses électeurs se recrutent dans toutes les couches sociales et parmi les jeunes. Les puissants lobbys pro-armes, de l’agro-business et les évangéliques se sont rangés derrière lui.

Mais par ses insultes Bolsonaro s’est aliéné les Noirs, les femmes et les homosexuels. A la veille du scrutin, il a adouci le ton. « Nous gouvernerons pour tout le monde, même pour les homosexuels, car il y en a qui sont pères, qui sont mères », a-t-il assuré.

Haddad, lui, est le réceptacle de la haine farouche qu’inspire Lula à des millions de Brésiliens.

Le PT a gagné les quatre dernières présidentielles, mais est jugé par beaucoup responsable des plaies actuelles du Brésil. Durant la campagne, Haddad n’a pas fait l’inventaire de ces années-là.

– Marasme –

Celui qui succèdera pour quatre ans au très impopulaire Michel aura pour tâche d’extraire ce pays-continent du marasme et de redonner de l’espoir à un peuple exaspéré.

Economie en berne avec 13 millions de chômeurs, discrédit des élites politiques, corruption endémique et violence record rongent le Brésil.

La polarisation politique aura été fatale aux autres grands candidats.

Ciro Gomes (PDT, centre gauche) n’a que 13 à 15% des intentions de vote, alors qu’il est le mieux à même de battre Bolsonaro au 2e tour. L’écologiste Marina Silva (Rede), qui avait réuni plus de 20 millions de voix aux deux dernières présidentielles, s’est effondrée.

Si la présidentielle peut faire basculer le Brésil dans une ère inconnue, les élections des gouverneurs et des assemblées des 27 Etats, des 513 députés de la Chambre basse et des deux tiers des 81 sénateurs également prévues dimanche ne devraient en revanche pas transformer radicalement le paysage politique.

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