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Niki Lauda, l’entrepreneur qui ne faisait « pas de cadeaux »

La sempiternelle casquette publicitaire rouge en témoignait: il n'y avait pas de petit profit pour Niki Lauda qui, outre son…

La sempiternelle casquette publicitaire rouge en témoignait: il n’y avait pas de petit profit pour Niki Lauda qui, outre son statut de légende de la F1, a cultivé une image d’homme d’affaires âpre au gain et a multiplié les bonnes affaires dans le domaine aérien.

Non content d’avoir « remporté trois fois le Championnat du monde de F1, il était aussi un businessman vraiment solide », a rappelé dans un tweet mardi Franz Tost, le patron de l’écurie de F1 Toro Rosso, parmi les nombreux hommages.

L’ancien pilote décédé lundi à 70 ans avait selon le magazine Trend accumulé une fortune de 150 à 400 millions d’euros, abritée en partie dans un système de « fondations » aussi légales que fiscalement avantageuses.

Mais sa villa viennoise évaluée à quelque 10 millions d’euros, son yacht de 47 mètres, sa propriété aux Baléares et le jet privé long courrier qu’il pilotait lui-même n’avaient pas fait oublier à ce descendant d’industriels la valeur des choses.

« Je ne me rachète un pull ou un pantalon que quand les anciens sont usés ou délavés au point de n’être plus portables. Et seulement à ce moment-là », a-t-il un jour expliqué à la revue allemande Focus.

La légende raconte qu’il avait fait avec son concurrent français Alain Prost le pari d’effectuer une tournée promotionnelle entière sans dépenser « un seul dollar ».

Un sens de l’économie — ses détracteurs parlaient d’avarice — dont Lauda avait fait un argument marketing. Il avait ainsi réalisé une campagne de publicité pour une banque en ligne dans laquelle il soulignait qu’il n’avait « pas de cadeaux à faire ».

Dans une phrase restée célèbre, il ne s’était pas privé d’ironiser sur sa propre tournure d’esprit: « Vu les salaires actuels des pilotes, si j’étais Américain, je ferais probablement un procès à ma mère pour m’avoir mis au monde trop tôt ».

Cette forme de cynisme lui avait été vivement reprochée après son refus de porter assistance à Roger Williamson lors de l’accident qui coûta la vie au pilote Britannique au GP des Pays-Bas en 1973. « Je suis payé pour rouler, pas pour m’arrêter », avait expliqué Lauda. Qui lui-même devait être tiré des flammes par des concurrents trois ans plus tard sur le Nürburgring…

– Pionnier du charter –

Mais Niki Lauda était aussi et avant tout un investisseur habile et visionnaire dans le transport aérien, son autre domaine de prédilection aux côtés de la F1 où il a continué jusqu’à la fin à travailler comme président non exécutif de l’écurie Mercedes.

Pionnier du charter privé, il crée dès 1979 sa première compagnie aérienne, Lauda Air, qu’il revend en 2002 avec profit à la compagnie nationale Austrian Airlines, onze ans après le crash d’un de ses appareils sur un vol Bangkok-Vienne (223 morts).

Dès 2004, ce pilote de ligne confirmé, qui exploite par ailleurs un petite société de jets d’affaires, lance son nouveau bébé: la compagnie à bas coûts Niki, dont il affirmera qu’elle a été « rentable dès la première année ».

Lauda revend finalement Niki à son concurrent Air Berlin en 2011, moyennant une très confortable plus-value.

Quand la société allemande fait faillite en 2017, il parvient grâce à un coup de billard à trois bandes dont il a le secret et avec le soutien de l’Etat autrichien à récupérer Niki au nez et à la barbe du groupe hispano-britannique IAG/Vueling, précédemment retenu.

Après avoir racheté Niki pour 47 millions d’euros en janvier 2018, il en cède 75% quelques semaines plus tard à Ryanair pour 50 millions. L’Autrichien revendra finalement l’intégralité de ses actions au groupe irlandais, tout en restant codirigeant de la compagnie, rebaptisée LaudaMotion puis Lauda.

Un maître du bonneteau ? « Je crois que je sais dépenser mon argent au bon moment », avait un jour résumé l’ancien pilote.

Son souci d’économie se manifeste également dans sa gestion du personnel: Lauda aime à externaliser ses salariés, refuse les comités d’entreprise et l’affiliation aux conventions collectives, qui selon lui évoquent les « tréfonds du Bloc de l’Est ».

Ce père de quatre enfants, issus de deux mariages différents, savait toutefois aussi se montrer désintéressé: en 1996, dans un Rwanda encore dévasté par la guerre, il avait piloté jusqu’à Kigali un avion d’aide humanitaire.

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