Donald Trump a de nouveau évoqué mardi des discussions avec l’Iran qui pourraient selon lui intervenir « très bientôt », tandis que Téhéran a accueilli avec scepticisme l’offre du président américain la veille de rencontrer les dirigeants iraniens « quand ils veulent ».
Rappelant sa décision de retirer les Etats-Unis de l’accord sur le nucléaire iranien signé avec les grandes puissances en 2015, M. Trump a déclaré lors d’un discours à Tampa (Floride): « J’espère que ça ira bien pour l’Iran. Ils ont beaucoup de difficultés en ce moment ».
« J’ai le sentiment qu’ils nous parleront très bientôt… ou peut-être pas, et c’est bien aussi », a-t-il ajouté.
Malgré son hostilité déclarée au régime iranien, M. Trump a semblé lundi ouvrir la porte à des discussions au plus haut niveau, sans conditions préalables.
Les principaux leaders iraniens se sont abstenus de réagir mardi à cette proposition.
Mais les réactions ont été globalement très négatives dans les cercles politiques iraniens, le vice-président du Parlement Ali Motahar affirmant à l’agence Fars que discuter avec M. Trump « serait une humiliation ».
« L’Amérique n’est pas fiable », a renchéri le ministre de l’Intérieur Abdolreza Rahmani Fazli, selon Fars. « Après son retrait arrogant et unilatéral de l’accord nucléaire, comment peut-on lui faire confiance? »
Sur Twitter, un conseiller du président iranien Hassan Rohani, Hamid Aboutalebi, a assuré que toute discussion avec les Etats-Unis devait commencer par « le respect de la grande nation iranienne, la réduction des hostilités et le retour des Etats-Unis dans l’accord nucléaire ».
Peu avant les propos de M. Trump lundi, le porte-parole du ministère iranien des Affaires étrangères avait qualifié d' »impossibles » des pourparlers avec l’administration américaine actuelle.
« Washington révèle sa nature indigne de confiance jour après jour », avait déclaré Bahram Ghasemi selon l’agence Mehr, citant « les mesures hostiles des Etats-Unis envers l’Iran après leur retrait (de l’accord nucléaire) et le rétablissement des sanctions économiques » américaines contre Téhéran.
Le président Trump s’apprête en effet à réimposer des sanctions en deux étapes, le 6 août et en novembre.
Il a dit vouloir obtenir, grâce à sa stratégie de « pression maximale », un nouvel accord qui irait au-delà de la limitation du programme nucléaire de Téhéran et permettrait de limiter son influence régionale et son programme balistique.
Pour Mohammad Marandi, professeur à l’Université de Téhéran et l’un des négociateurs iraniens de l’accord nucléaire de 2015, l’Iran « ne peut pas négocier avec quelqu’un qui viole ses engagements internationaux, menace de détruire des pays et change constamment de position ».
– « Tabou » –
Comme bien d’autres, cet universitaire estime que le retour des Etats-Unis dans l’accord est un préalable à toute discussion.
Plus rares sont ceux qui se montrent compréhensifs, comme le président de la commission des Affaires étrangères au Parlement.
« Des négociations avec les Etats-Unis ne doivent pas être taboues », a dit Heshmatollah Falahatpisheh à l’agence Isna. « A cause d’une méfiance historique, les liens diplomatiques ont été détruits » et il n’y a pas d’autre choix que de chercher à réduire les tensions, selon lui.
Il y a une semaine à peine, MM. Rohani et Trump avaient eu un échange très tendu, signe de l’incompréhension entre la République islamique et la Maison Blanche.
Le président iranien avait évoqué la perspective de la « mère de toutes les guerres » et son homologue américain lui avait promis des « conséquences telles que peu en ont connues auparavant au cours de l’histoire ».
D
ans les rues de Téhéran, la population se sent plus concernée par les difficultés économiques, notamment la crise monétaire, qui a vu le rial perdre près des deux tiers de sa valeur face au dollar depuis le début de l’année.
« Tout ce qui peut aider le peuple dans cette situation difficile est le bienvenu », a affirmé Fathi, qui travaille dans un cabinet d’assurance.
Hushiar, un employé de bureau, va plus loin: « On croit tous que Trump est l’ennemi de l’Iran mais peut-être qu’il veut maintenant donner sa chance au peuple iranien et, si Dieu le veut, cela pourrait nous aider à sortir de ce désastre ».
Si le retour imminent de sanctions américaines fait craindre aux Iraniens des temps encore plus difficiles, beaucoup ont du mal à croire qu’ils peuvent faire confiance au dirigeant qui contribue à leurs déboires économiques.