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Un manifestant tué à Bagdad, des dizaines blessés dans le sud de l’Irak

Un manifestant a été tué mardi dans le coeur historique et commerçant de Bagdad devenu champ de bataille, et des…

Un manifestant a été tué mardi dans le coeur historique et commerçant de Bagdad devenu champ de bataille, et des dizaines ont été blessés dans le sud de l’Irak, pris dans l’épaisse fumée noire des pneus brûlés qui bloquent désormais infrastructures et routes.

Dans l’un des pays les plus riches en pétrole du monde, les protestataires réclament la refonte du système politique et le renouvellement total de leur classe dirigeante qu’ils jugent corrompue et incompétente. Ils s’en prennent également au grand voisin iranien qu’ils accusent de tirer les ficelles chez eux.

La journée de mardi semble marquer un tournant: les violences qui ont déjà fait depuis deux mois environ 350 morts ont gagné des villes jusqu’ici cantonnées aux rassemblements festifs et autre désobéissance civile pacifique, dans le sud, et se prolongent désormais en journée là où elles ne survenaient que la nuit.

A Bagdad, au beau milieu d’un nuage de lacrymogène, alors qu’il tentait de se protéger avec un maigre bouclier de tôle ondulé, un jeune homme est tombé sous les balles en caoutchouc des forces de l’ordre, rapportent les manifestants en montrant des taches de sang au sol. Il a rendu son dernier souffle à l’hôpital, indiquent des médecins à l’AFP, tandis qu’une vingtaine d’autres manifestants ont été blessés.

– « Dans des cercueils » –

Car les abords du pont al-Ahrar, proche de la place Tahrir, épicentre du premier mouvement de contestation spontané de l’Irak post-Saddam Hussein, ont bien changé. Avant ici, on se pressait pour faire des achats près de cet axe qui durant des décennies a été considéré comme les Champs Elysées de Bagdad.

Aujourd’hui, on assiste à des scènes de guerre: d’un côté des murs de béton montés à la hâte en travers des rues, les forces de l’ordre tirent, parfois à balles réelles; de l’autre, les jeunes manifestants, désormais tous casqués et le visage recouvert de foulards pour se protéger des grenades lacrymogènes –qui font suffoquer mais ont aussi tué.

Certains s’abritent derrière des boucliers de tôle, d’autres, accroupis essayent de progresser vers les grenades pour les neutraliser ou les relancer vers les policiers antiémeutes.

Au milieu du chaos, tous jurent pourtant qu’ils resteront. « On ne repartira que dans des cercueils », lance l’un d’eux à l’AFP.

« De toute façon, je n’ai pas de boulot, pas d’argent, alors rester ici ou rentrer chez moi, c’est pareil », renchérit un autre. « Sans travail et sans salaire, je ne pourrai jamais me marier donc je n’ai ni de famille à moi, ni de maison à moi », poursuit, amer, le jeune homme, drapeau irakien sur les épaules.

Si derrière lui, la fumée est blanche –parfois orange, verte ou violette selon les modèles des grenades–, ailleurs, dans le sud du pays aux écoles et aux administrations paralysées par la désobéissance civile, les colonnes qui s’élèvent vers le ciel sont d’un noir profond et tout aussi suffoquant.

– Champs pétroliers –

En travers des principaux axes du pays, des manifestants brûlent des pneus. Dans la province de Zi Qar, ils essayent de frapper le pouvoir au seul endroit qui peut lui faire mal, ses ressources en pétrole, unique source de devises du pays. Ils bloquent déjà les accès à trois champs pétroliers –Garraf, Nassiriya et Soubba, dont la production atteint 200.000 barils par jour.

Treize policiers chargés de protéger Garraf ont été blessés dans les affrontements, de source policière, mais l’extraction d’or noir se poursuit.

A Diwaniya, les manifestants empêchent les employés d’accéder à l’une des trois centrales électriques de la province, à des ponts et des routes menant vers Najaf à l’ouest et Samawa au sud.

D’autres villes du sud, où la contestation avait jusque là un caractère bon enfant, ont été à leur tour gagnées par les violences.

A Al-Hilla, dans la province de Babylone au sud de Bagdad, une soixantaine de manifestants ont été blessés par des tirs de grenades lacrymogènes dans des heurts, selon des médecins.

A Kerbala, où les violences sont particulièrement intenses, manifestants et policiers se jettent des cocktails Molotov. D’habitude, ces échanges se déroulent la nuit dans la ville sainte chiite, mais depuis aujourd’hui, ils continuent de jour.

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