Documentaire de la BBC: Le gouvernement se «réserve le droit de donner une suite appropriée à cette affaire»

Le gouvernement sénégalais a indiqué mercredi 05 juin se réserver «le droit de donner toute suite appropriée» aux accusations de fraude rapportées par un documentaire de la chaîne publique anglaise BBC. Une affaire dans laquelle est citée Aliou Sall, frère du président sénégalais Macky Sall.

Dans un mémorandum rendu public, en marge d’une conférence de presse animée à ce sujet par la porte-parole du gouvernement, Ndèye Tické Ndiaye Diop, le gouvernement dit se réserver « le droit de donner toute suite appropriée à ce dossier ». 

Il estime que la BBC, conformément aux règles d’éthique et de déontologue professionnelle et « par souci d’équité et d’équilibre dans l’information (…), n’aurait pas dû se limiter dans son reportage à une version unilatérale, alimentée par deux opposants notoires, dont l’agitation sur le pétrole est connue de tous ».

L’ancien Premier ministre Abdoulaye Mbaye, de même que le député Mamadou Lamine Diallo, banquier et économiste respectivement, comptent parmi deux des personnes ressources sénégalaises interrogées par la BBC dans son documentaire.

MM. Mbaye et Diallo font partie des opposants les plus en vue au président Macky Sall, dont le frère Aliou Sall, maire de Guédiawaye (banlieue dakaroise) et directeur général de la Caisse des dépôts et consignations (CDC), est visé par ce documentaire publié lundi dernier.

Le documentaire affirme démontrer comment la société de Frank Timis s’était vu retirer puis réattribuer son autorisation après l’accession au pouvoir du président actuel Macky Sall.

Ces concessions revendues par Frank Timis à la société britannique BP permettraient à Timis de gagner plus de 10 milliards de dollars par an.

Le film de la BBC cite un paiement d’un montant de 250.000 dollars, soit 146 millions de francs CFA destiné à la société Agritans Sarl qui aurait appartenu à Aliou Sall, présenté comme un facilitateur de Frank Timis de Timis Corporation pour l’attribution de contrats d’exploitation. 

Cette somme représenterait selon un courriel des taxes de la société offshore de Timis dues à l’origine à l’Etat sénégalais.

Des paiements sont également cités, qui auraient été accordés à Aliou Sall par Pétrotim pour des services de consultance. 

Intitulé « Sénégal : Scandale à 10 milliards », ce reportage « est ponctué de graves et fausses allégations sur la gouvernance des ressources pétrolières du Sénégal, notamment les blocs appelés Saint-Louis offshore profond et Cayar offshore profond qui avaient été attribués à la société Petro-Tim, en association avec la société des Pétroles du Sénégal (PETROSEN), conformément au Code pétrolier », affirme le gouvernement sénégalais.

Il soutient que le média anglais « avance, sans aucun fondement, le chiffre surréaliste de 10 milliards de dollars que l’État sénégalais aurait perdus dans une transaction entre deux compagnies privées, relative aux deux blocs précités ». 

« Ce chiffre est purement imaginaire. Il ne correspond à aucune réalité économique et financière du projet, encore moins à une quelconque perte de revenus futurs pour l’Etat du Sénégal », peut-on lire dans le mémorandum publié à ce sujet.

Le gouvernement sénégalais parle d’une « grave atteinte à la réputation de l’Etat du Sénégal », rappelant que « l’instruction du dossier évoqué dans le reportage a été conclue avant l’entrée en fonction de SEM le Président Macky Sall, le 2 avril 2012 ». 

Le gouvernement sénégalais fait valoir qu’un « effort indéniable de transparence et de protection des intérêts du Sénégal » est à mettre à son actif, depuis 2012 et l’accession du président Sall à la magistrature suprême.

Il cite notamment l’adhésion volontaire du Sénégal, à partir de 2013, à l’Initiative pour la Transparence dans les Industries extractives (ITIE) « dont le Conseil d’administration a décerné au Sénégal un satisfecit, le reconnaissant comme le premier pays africain ayant fait des « progrès satisfaisants » dans la mise en œuvre de la Norme ITIE ».

La constitutionnalisation du droit de propriété du peuple sur les ressources naturelles à l’issue du référendum de mars 2016, la publication « systématique de tous les contrats miniers et pétroliers depuis septembre 2016 », ainsi que la création, en octobre de la même année, du Comité d’orientation stratégique du pétrole et du gaz (COS-PETROGAZ), s’inscrivent dans la même logique, selon le mémorandum.

Le document signale que cet organe en particulier est ‘’chargé d’assister et de conseiller le résident de la République et le Gouvernement dans la définition, le suivi et la mise en œuvre des stratégies et politiques publiques en matière pétrolière et gazière’’. Sur décision du président Macky Sall, la composition de ce comité sera désormais élargie à la société civile et à l’opposition, relève la même source.

La création en décembre 2017, de l’Institut national du Pétrole et du Gaz (INPG) dont l’objectif est de former des ressources humaines hautement qualifiées, de même que la concertation nationale sur la gestion des revenus futurs issus de l’exploitation des ressources pétrolières, tenue en juin 2018, entrent également en ligne de compte dans la volonté de transparence du gouvernement, fait-il valoir. 

Il y a aussi le vote par l’Assemblée nationale, en février dernier, de la loi « sur le contenu local destinée à maximiser la part du secteur privé national dans l’exploitation des ressources pétrolières », sans compter l’adoption en Conseil des ministres du projet de loi sur la répartition et l’encadrement des revenus futurs issus de ces ressources, lequel « prévoit la création d’un fonds pour les générations futures ».

Le gouvernement met en outre en avant le vote par l’Assemblée nationale du nouveau Code pétrolier, qui introduit « une plus grande transparence dans les procédures d’attribution des contrats pétroliers, renforce les parts de l’Etat dans l’exploitation des ressources et améliore la transparence dans la gestion des opérations pétrolières et des aspects environnementaux ».

Selon le gouvernement, ces mesures précitées « témoignent de la volonté du Président Macky Sall d’instaurer la transparence et de préserver les intérêts du Sénégal dans la gestion de ses ressources pétrolières ».